Guillaume Bapst
Ashoka Fellow depuis 2006   |   France

Guillaume Bapst

Guillaume Bapst révolutionne la façon dont les ménages à faibles revenus accèdent à la nourriture et l'achètent. Afin d'améliorer le système de distribution alimentaire en France, où…
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Guillaume Bapst est un alumni du réseau Ashoka. Pour plus d’information sur ce statut, veuillez nous contacter à [email protected].

 

IDÉE

A.N.D.E.S apporte depuis près de 15 ans des solutions innovantes pour proposer une alimentation saine et accessible aux personnes en situation de précarité bénéficiaires de l’aide alimentaire. Elle soutient le développement des épiceries solidaires, associations caritatives fonctionnant comme des magasins de libreservice qui proposent à 20% du prix usuel des produits de consommation courante à leur “clients”.

 

IMPACT

Après 15 ans d’activité, A.N.D.E.S compte près de 300 épiceries adhérentes à son réseau. 140 000 personnes fréquentent les épiceries solidaires. Il y a 5 chantiers d’insertion, 4 basés sur des marchés de gros et axés sur la revalorisation des fruits et légumes et le retour à l’emploi, le cinquième au sein d’une ferme dans l’Orne. A.N.D.E.S a lancé le programme Uniterres, permettant le rapprochement entre 100 petits producteurs et 30 épiceries solidaires A.N.D.E.S. Uniterres est Lauréat de La France s’engage en juin 2015. Enfin, le réseau des épiceries solidaires a lancé des soupes au rayon frais en grande distribution. A.N.D.E.S a remis 250 personnes à l’emploi jusqu’à aujourd’hui et permet de nourrir mieux 1,6 million de personnes par an.

 

QUI EST-IL ?

A 22 ans, Guillaume crée un Poney Club. Il anime une émission de radio locale sur la création d’entreprise. Cadre d’Offices HLM, il est confronté aux difficultés budgétaires des locataires. Il crée alors une épicerie solidaire, puis un réseau national. 

This description of Guillaume Bapst's work was prepared when Guillaume Bapst was elected to the Ashoka Fellowship in 2006.

Introduction

Guillaume Bapst révolutionne la façon dont les ménages à faibles revenus accèdent à la nourriture et l'achètent. Afin d'améliorer le système de distribution alimentaire en France, où l'accès est souvent lent et bureaucratique, où le choix est limité et où la qualité et la valeur nutritionnelle sont faibles, Guillaume a mis en place un réseau d'épiceries solidaires.

L'idée nouvelle

Guillaume Bapst a conçu un nouveau système de distribution de nourriture aux personnes démunies en France. Par l'intermédiaire de son organisation, l'Association nationale de développement des épiceries solidaires (ANDES), et d'un réseau d'« épiceries solidaires », Guillaume s'attaque au problème croissant de la faim et de la malnutrition en France, dans le cadre d'un objectif plus large visant à resocialiser les personnes vivant sous le seuil de pauvreté, à leur donner des choix en tant que consommateurs et à les aider à mieux gérer leur vie quotidienne. Grâce à une gestion centrale efficace, à des chaînes d'approvisionnement étroites et à des économies d'échelle, les épiceries fournissent des produits de qualité standard aux familles à faibles revenus tout en restant largement durables. Plus important encore, les magasins locaux proposant une grande variété de produits d'épicerie offrent aux familles un choix et un plaisir dans l'achat de leur nourriture, ce qui donne aux consommateurs un sentiment d'autonomie tout en encourageant un régime alimentaire équilibré. L'idée de Guillaume est centrée sur le caractère abordable des produits (10 à 30 % du prix du marché) et sur la liberté de choisir entre les produits. Cela permet aux personnes dans le besoin de conserver leur estime de soi et, dans certains cas, de ne plus dépendre de l'aide de l'État ou d'organisations caritatives. L'idée de créer des épiceries solidaires payantes est née de la réflexion de Guillaume sur la nature de l'« assistance » et, en particulier, sur l'observation selon laquelle « un don qui ne peut être réciproque rabaisse le bénéficiaire, surtout lorsqu'il n'y a pas de possibilité de donner quelque chose en retour » (Marcel Mauss, Essai sur le Don).

L'argent économisé grâce à ce modèle doit être réinvesti dans un projet conçu par le travailleur social et le client. Ces projets peuvent être des bourses d'études pour les enfants, des réparations de voiture pour se rendre au travail ou la réduction des dettes. La faim est évidemment l'effet le plus douloureux de la pauvreté, mais comme les repas impliquent aussi le partage et la convivialité, les programmes traditionnels de distribution de repas suppriment la chaleur et le réconfort que les repas partagés devraient apporter. Au-delà d'une meilleure alimentation, les épiceries solidaires sont devenues un lieu de rassemblement pour une variété d'autres services de réhabilitation et d'intégration. Des efforts particuliers sont déployés pour redonner aux clients le goût de la préparation des repas et d'une alimentation saine et équilibrée - se nourrir devient alors un plaisir et une occasion d'interaction sociale. En outre, d'autres activités sont organisées, des cours de cuisine aux ateliers pour parents et enfants qui contribuent à renforcer les liens familiaux. Ainsi, l'idée de Guillaume a des retombées sociales et économiques et constitue une plate-forme puissante pour la réinsertion dans la société.

Le problème

Au sein de l'Union européenne, 12 % des ménages vivent dans la pauvreté avec des revenus mensuels compris entre 260 € et 550 €. En France, en 2003, entre 3,7 et 7,1 millions d'individus - selon le seuil utilisé - étaient considérés comme « pauvres ». La pauvreté ne touche pas que les chômeurs, car de nombreuses personnes ayant un emploi vivent dans des ménages dont les revenus sont inférieurs à 60 % de la moyenne nationale. Selon l'Institut national de la statistique et des études économiques, en 2003, 75 % des 1,3 million de travailleurs français considérés comme pauvres recevaient moins de 534 euros par mois pour leur famille. La loi économique d'Ernst Engel montre qu'à mesure que les revenus des ménages augmentent, la part du revenu consacrée à l'alimentation diminue ; les groupes socio-économiques peuvent donc être caractérisés en fonction de leurs dépenses de consommation alimentaire. Les personnes vivant dans l'extrême pauvreté consacrent la quasi-totalité de leur revenu à l'alimentation pour survivre.

Il existe en France de nombreuses structures qui fournissent une aide alimentaire sous forme de repas préparés en libre-service ou de colis de prise en charge. Or, la qualité de ces aliments est souvent médiocre : une étude récente de l'ANDES a montré que l'état de santé des familles qui dépendent uniquement de l'aide alimentaire est bien pire que la moyenne nationale (problèmes de malnutrition, d'obésité et d'hypertension artérielle). Souvent, ces denrées alimentaires sont données alors qu'elles approchent de leur date de péremption ou qu'elles l'ont atteinte. Créée à l'origine pour répondre à des situations d'urgence et non pour satisfaire tous les besoins nutritionnels de ses bénéficiaires, l'aide alimentaire est devenue dans de nombreux cas la seule source d'alimentation pour les personnes démunies. En moyenne, l'aide alimentaire est reçue pendant 25 mois et la variété de la nourriture dépend entièrement de ce qui est disponible et distribué pendant cette période. Malgré leurs efforts pour se conformer aux recommandations du Programme Nutrition Santé en offrant des repas diversifiés ou des boîtes alimentaires, les structures de distribution actuelles sont confrontées à de fortes contraintes d'approvisionnement qui affectent la variété et la qualité. Si le manque de qualité nutritionnelle est une préoccupation majeure, l'incapacité des familles à faibles revenus à choisir ce qu'elles mangent ne doit pas être négligée. La consommation de base étant l'expression d'un choix libre, être privé de choix est une autre forme d'exclusion. Plutôt que de contribuer à la stigmatisation des pauvres en leur donnant l'aumône, un système plus efficace traiterait les gens comme des clients ayant des choix à faire. Ce système aurait des implications allant au-delà de la simple alimentation : il pourrait contribuer à sortir les individus de leur désespoir, à améliorer leur image de soi, à changer les préjugés de la société et à commencer à les intégrer dans la société.

La stratégie

Créée en avril 2000, ANDES a pour mission de développer un nouveau modèle d'épicerie solidaire qui puisse être reproduit et adapté à différentes régions. Bien que chaque magasin soit unique, ils sont tous gérés de manière centralisée et professionnelle et sont construits autour de la valeur fondamentale du respect de l'autonomie des clients qu'ils servent.

L'un des principaux problèmes de ces épiceries étant la compétitivité des prix, Guillaume a décidé de créer une centrale d'achat et de logistique qui lui permettra d'assurer un approvisionnement constant en marchandises à bas prix sans sacrifier la qualité. En achetant en gros, Guillaume profite des meilleurs prix et des tarifs les plus bas et contribue à l'excédent de fonds publics au niveau local. Cette plate-forme logistique est sur le point d'être mise en place à Angers, un lieu stratégique en France, où les autorités locales se félicitent des nouveaux emplois que le projet de Guillaume va créer. La collectivité locale a accepté de mettre gratuitement à la disposition de Guillaume un site d'exploitation.

Cependant, il ne suffit pas d'avoir un lieu centralisé pour distribuer les produits, et il est convaincu qu'il doit mettre en place des partenariats stratégiques avec de grandes marques. Ces partenariats leur permettront de bénéficier des meilleurs prix et, dans certains cas, de recevoir des produits gratuitement (Guillaume utilise le cadre fiscal français pour leur montrer comment ils peuvent déduire 60 % de la valeur de leurs produits de leurs impôts). À ce jour, il s'est associé à Nestlé, Unilever, Ferrero, Poulets de Loué et d'autres entreprises. Son objectif est d'associer les entreprises et les marques les plus puissantes à son projet afin de couvrir les besoins fondamentaux de ses clients. Il prévoit également d'élargir la gamme de produits qu'ils fournissent, tels que le mobilier et les appareils électroménagers. Souvent, lorsque les gens n'avaient rien dans leur appartement, ils avaient honte d'inviter quelqu'un chez eux.

Guillaume s'efforce d'associer de grands distributeurs nationaux à sa propre chaîne de distribution. Parce qu'ils ont une large présence et un énorme pouvoir de négociation, ils seraient des alliés de poids pour l'aider à développer son programme. En positionnant ANDES comme un partenaire qui amènera des milliers de personnes dans leurs magasins, plutôt que comme un concurrent, Guillaume a pu récemment signer un accord avec Carrefour - un grand pas en avant pour le développement national d'ANDES. Les épiceries solidaires sont conçues pour les personnes exclues du marché de la consommation habituelle en raison de leurs faibles revenus. ANDES donne aux personnes qui n'ont pas les moyens de faire leurs courses dans les épiceries traditionnelles la possibilité d'acheter les aliments qu'elles souhaitent sans avoir à sacrifier la qualité. Le fait de pouvoir prendre des décisions de consommation et de participer à l'échange monétaire redonne à l'acheteur sa dignité et son indépendance économique. L'accès à l'épicerie n'est pas permanent, mais dépend du projet que le « client » a élaboré avec les travailleurs sociaux et le gérant de l'épicerie. Dans la plupart des cas, il s'agit de réduire l'endettement du client. Cette démarche est essentielle, car elle permet au client d'apprendre à mieux gérer son budget hebdomadaire ou mensuel, à faire le bon choix entre deux produits ou à commencer à épargner pour des dépenses futures, comme les études. Dans les épiceries de Guillaume, avec de l'aide, trois clients sur quatre atteignent l'objectif qu'ils se sont fixé.

Si les épiceries ont pour vocation première de vendre de la nourriture, elles offrent bien plus. Chaque épicerie devient un outil créatif pour développer des liens sociaux afin d'aider les acheteurs à aborder d'autres questions, telles que la santé, le logement, le travail et l'éducation. Ainsi, les épiceries solidaires sont une voie vers l'inclusion sociale et la restauration de la citoyenneté économique. Guillaume estime qu'il est essentiel que ses clients contribuent à chaque magasin en participant à sa gestion et en aidant à façonner et à animer les ateliers qui y sont organisés. Certains des ateliers les plus réussis, animés par les clients, sont axés sur la cuisine et apprennent aux gens ce qu'il faut cuisiner et comment le faire pour avoir une alimentation saine et équilibrée. Aujourd'hui, le réseau ANDES comprend environ 60 épiceries et dessert des centaines de ménages, soit 24 000 personnes par an. Avec un budget de 160 000 € pour 2006, l'association développe des outils (logiciels, formations et échanges de bonnes pratiques) pour faciliter la gestion des stocks et noue des partenariats stratégiques avec l'industrie agro-alimentaire pour permettre aux structures existantes de sortir d'une vulnérabilité économique récurrente. Guillaume est aujourd'hui à un tournant et son objectif est de développer de plus en plus d'épiceries de ce type en France, en commençant par les zones les plus dévastées économiquement, comme les 700 Zones Urbaines Sensibles. Il envisage de s'implanter dans les zones rurales isolées où vivent de plus en plus de personnes démunies. Guillaume est convaincu qu'un partenariat avec une entreprise comme Carrefour ferait une énorme différence dans la rapidité de sa diffusion et le nombre de personnes qu'il peut atteindre.

La personne

Pendant son enfance, Guillaume a eu deux modèles : sa marraine, qui a toujours été une travailleuse sociale, et son oncle, un chef d'entreprise prospère. Il n'est donc pas surprenant qu'il soit devenu convaincu de l'importance de lier les mondes économique et social, qui semblent souvent opposés. Dans sa jeunesse, Guillaume a occupé plusieurs postes dans le secteur public, notamment dans la gestion de l'immigration et du logement. C'est là qu'il s'est rendu compte de la pression que l'achat de nourriture peut exercer sur le budget d'une famille, et des sacrifices que cela peut entraîner en termes de santé, d'éducation ou de logement. En 1999, Guillaume s'est rendu compte qu'un moyen d'aider les familles qui peinent à payer leur loyer serait de les aider à économiser sur leur budget alimentaire, et a créé une épicerie solidaire pour fournir des aliments de meilleure qualité aux familles à faibles revenus. En réponse à la publicité qui a suivi, la secrétaire d'État à l'économie sociale lui a demandé d'étudier la manière dont son projet pourrait être reproduit. C'est à ce moment-là qu'il a décidé de reprendre ses études (développement urbain et économie sociale) pour formaliser le développement d'une union d'épiceries solidaires et commencer à reproduire son projet à travers le pays.Guillaume a eu l'esprit d'entreprise dès son plus jeune âge. Passionné d'équitation, il crée un club d'équitation à l'âge de 22 ans pour transmettre sa passion aux enfants. Repéré par une chambre de commerce locale comme jeune créateur d'une entreprise dynamique, il a ensuite animé une émission de radio sur l'entrepreneuriat et formé des jeunes à la création d'entreprise.